INT x PLATEFORME 10

Eye Tracking
17.10.2018 – 09.05.2019
LabElysée

D’octobre 2018 à janvier 2019, INT est en résidence au Musée de l’Elysée pour développer un dispositif de narration sonore piloté par le mouvement des yeux. A la différence d’un audioguide classique, le système vise à donner des informations sur l’œuvre et son contexte en se basant sur ce que regarde le visiteur ou la visiteuse.

Cette résidence s’inscrit dans le cadre d’un projet de recherche mené par les trois musées de PLATEFORME 10 sous l’impulsion d’Engagement Migros. Après avoir exploré la numérisation haute définition, le projet se poursuit pour créer des liens tangibles entre les publics et les contenus numérisés. Les contrôleurs tels que l’Eye Tracking (oculométrie) offrent de nouvelles possibilités d’interaction et ouvrent la voie à de nouvelles formes de contenus interactifs.

Au-delà de l’aspect b purement technique, la résidence vise à explorer une forme de narration non linéaire. Le regard influence l’information et l’information influence le regard. Qui contrôle qui ? Peut-on appliquer ce principe pour présenter le travail d’un artiste ? Comment créer un scénario cohérent ? Comment les visiteurs réagissent-ils face au dispositif ?

Premier prototype
Le premier prototype présente REEF IDLIB, 3 MAI 2014, une œuvre de Matthias Bruggmann. Cette image montre des trafiquants d’antiquités en train de nettoyer des pièces antiques. Elle fait partie de l’exposition Un acte d’une violence indicible présentée au sous-sol du musée. En nous exposant aux strates d’information d’une guerre complexe, Matthias Bruggmann révèle des histoires sous-jacentes au conflit qui n’apparaissent pas au premier coup d’œil.

« Des intermédiaires utilisent du liquide à récurer les toilettes et un outil dentaire pour nettoyer des pièces antiques. Des pièces et d’autres antiquités étaient exportées à travers toute la région, surtout vers la Turquie, mais également vers le Liban et, dans certains cas, vers la Jordanie, d’où des shekels en argent alimentaient l’industrie du souvenir de Jérusalem. La part de travail la plus compliquée était de falsifier la provenance afin que les antiquités puissent pénétrer le très lucratif marché occidental – les commerçants des pays voisins prenaient 50% des produits de l’acquisition. Le prix d’achat local d’une mosaïque byzantine d’environ deux mètres carrés, à cette époque-là, était d’entre 1500 et 2000 dollars, et pour la contrebande vers un pays voisin il fallait compter environ 4000 dollars. La plupart des transactions étaient arrangées via WhatsApp et les Syriens se faisaient fréquemment escroquer par des intermédaires étrangers. Un des hommes sur cette image se plaignit plus tard qu’une transaction avec un négociant nord-américain lui avait coûté une petite fortune lorsqu’il avait refusé de lui payer son dû. » Matthias Bruggmann

Résidence

La résidence permet de profiter d’être en situation d’exposition pour faire évoluer le dispositif, tant d’un point de vue technique qu’expérientiel. Le visiteur est invité à se positionner face à un écran et regarder une image du photographe Matthias Bruggmann. Un capteur suit son regard et analyse quelle zone de l’image il regarde. Des commentaires (audio) sont associés à chaque zone et sont diffusés sur des haut-parleurs au fur et à mesure que le regard balaye l’œuvre. Afin d’éviter la répétition (les yeux étant en mouvement perpétuel), l’algorithme devra déceler les points d’intérêt du spectateur et fournir l’information graduellement en se basant sur l’analyse du chemin parcouru.

Le dispositif dévoilé le 17 octobre est volontairement sobre. La première étape du projet consiste à améliorer le logiciel et l’interaction avec le système d’Eye Tracking. A partir de ce point, diverses possibilités de développement seront évaluées, telles que l’ajout de médias annexes (par exemple, déclenchement de vidéos) ou la génération d’une trace du parcours du regard sur l’œuvre (sous forme d’impression, par exemple). Enregistrées et anonymisées, les données récoltées pourront aussi servir à produire des visualisations graphiques illustrant le temps de parcours, le chemin emprunté ou les zones d'intérêt.

Les membres du studio INT seront présents régulièrement dans les expositions afin de voir comment le dispositif est perçu par les visiteurs : est-il trop intrusif ou au contraire augmente-t-il l’œuvre de manière pertinente ? La forme exacte du projet à l’issue de la résidence n’est pas encore connue, mais doit répondre à un besoin de généralisation du procédé en vue de se passer de l’écran et l’utiliser directement sur une œuvre d’art.

INT studio

INT est un studio de design lausannois spécialisé en direction artistique, scénographie interactive et programmation créative. Le studio allie innovation technologique et conception d’idées novatrices. INT collabore principalement avec des partenaires culturels tels que des musées et théâtres, mais aussi avec des universités, bureaux d’architectes, artistes et designers ainsi que des événements de grande envergure.

INT a été fondé par Laura Perrenoud, David Colombini et Marc Dubois, les trois artistes et designers du studio artistique Fragmentin, un collectif dont les œuvres questionnent l’impact des technologies numériques sur notre quotidien.

Avec plus de quatre ans d’expérience dans la création de contenus interactifs, le studio s’est fait connaître pour sa manière inattendue d’expérimenter avec des technologies de pointe. Notamment en 2016 au ArtLab de l’EPFL, lors de l’exposition « Noir, c’est noir ? », où le studio a réalisé « Black & Lights », un dispositif interactif accompagnant l’œuvre d’un Outrenoir du peintre Pierre Soulages. L’expérience illustrait la relation triangulaire entre la lumière, l’observateur ou l'observatrice et la surface de la peinture et soulignait l’importance de ce trio dans l’œuvre de Soulages. Le mouvement du regard était détecté en temps réel et influençait l’éclairage sur l’œuvre.

Cet été, INT a pensé une scénographie composée de trois écrans pour une pièce de théâtre avec des migrants montrée au théâtre Arsenic à Lausanne.

En septembre 2018, INT a réalisé une installation sonore interactive pour la nouvelle exposition du Musée d’histoire naturelle de Neuchâtel, intitulée « Pôles, feu la glace ».

Partenaires

Le LabElysée reçoit le généreux soutien de la Fondation BNP Paribas Suisse, de la Loterie Romande, de l’Office fédéral de la culture (OFC) et du Canton de Vaud.